Le rapport du Groupe de travail sur le journalisme et l’avenir de l’information au Québec est une bonne nouvelle pour le journalisme québécois en général et les journalistes indépendants en particulier.
Ma réponse élaborée est ici.
Le rapport du Groupe de travail sur le journalisme et l’avenir de l’information au Québec est une bonne nouvelle pour le journalisme québécois en général et les journalistes indépendants en particulier.
Ma réponse élaborée est ici.
Réunis en congrès la fin de semaine dernière, les membres de la Commission-Jeunesse du Parti libéral du Québec se sont prononcés en faveur de la création d'un titre de journaliste professionnel. L'AJIQ appuie cette idée, dont je fais aussi personnellement la promotion au sein du Groupe de travail sur le journalisme et l'avenir de l'information au Québec, ainsi qu'au sein du conseil d'administration de la FPJQ, où je représente les journalistes indépendants. Il faut dire aussi que j'ai rencontré des représentants de la Commission-Jeunesse en juin dernier, et que cette idée d'un statut de journaliste professionnel faisait partie des solutions que je leur ai proposées.
Jeudi passé, dernière chronique magazines de la saison, pour Marie-Louise Arsenault et moi. Au programme:
1) Magazine de la semaine: Baron, un nouveau magazine québécois.
2) L'optimum, avril 2010 : années 90, pourquoi ces années-là ont tout changé.
3) The Atlantic, juin 2010, « How to save the news » : les projets de Google pour sauver le journalisme.
4) Details, mai 2010 : un portrait de Mark Pincus (créateur des jeux Farmville et Mafiawars) et l'article « The new thrill pill » ou comment des médicaments contre le Parkinson sont en train d'engendrer de nouveaux comportements jugés dangereux.
Ça s'écoute ici.
L’AJIQ cherche à obtenir pour les journalistes indépendants le droit à la négociation collective. L’objectif est de négocier des conditions minimales justes et acceptables, en termes de tarif et de protection de nos droits.
L’UDA l’a obtenu pour les artistes, l’APVQ et la STCVQ pour les techniciens de la télévision et du cinéma, etc. Les journalistes indépendants méritent un rapport de force semblable.
Une telle victoire bénéficierait à à tous les journalistes indépendants, de même qu'à la société québécoise dans son ensemble, qui aurait ainsi accès à une information de meilleure qualité. Mais pour y arriver, l’AJIQ a besoin de vous! Devenir membre de l’AJIQ, c’est contribuer à cette importante démarche.
Adhérez aujourd’hui!
Le site de l'AJIQ.
Je vois où l'auteur veut en venir, et je sais qu'il n'a pas totalement tort, mais de penser que la valeur du futur journaliste serait déterminée par sa capacité à s'époumonner sur les médias sociaux, à faire du bruit 2.0 et à accumuler les «amis» et les abonnés dans un monde où les machines à vent auraient gagné la guerre contre le sens, la profondeur et le travail discret et de longue haleine, contre la production d'information réelle et socialement utile—de penser ça, donc, ça me semble non seulement être une erreur fondamentale sur la nature et l'importance du travail journalistique, mais ça me donne aussi envie d'aller passer les prochaines décennies creux, creux dans le bois.«Ce qui fixera sa valeur économique objective, en fin de compte, ce sera peut-être l’importance de la contribution du journaliste aux liens entretenus avec sa communauté.»
Je suis membre de la table de discussion sur le statut professionnel des journalistes, constituée par le Groupe de travail sur le journalisme et l'avenir de l'information au Québec dans le cadre du mandat que lui a confié la ministre de la Culture et des Communications: proposer des solutions concrètes et réalistes aux problèmes actuels du journalisme et des médias d’information.
Parmi les questions dont nous devons discuter: devrait-on envisager de protéger le statut des journalistes professionnels? Pourquoi? Comment? Selon quels critères? Différentes initiatives sur le statut professionnel des journalistes sont étudiées aux États-Unis et en Europe, peuvent-elles inspirer une proposition qui réponde aux besoins de la réalité québécoise?
La première journée de discussion a eu lieu samedi dernier. À la suite de celle-ci, les priorités suivantes ont été établies:
Le compte rendu complet est disponible ici (pdf).
La prochaine rencontre aura lieu le 15 mai.
Les usines à contenus (une adaptation de leur surnom anglais, content farms) sont à l'information ce que les chaînes de restauration rapide sont à l'alimentation: guidées par le désir de servir les consommateurs le plus rapidement et le plus économiquement possible, avec peu d'égard pour la qualité.
Pour illustrer les méthodes de ces nouveaux producteurs d'information, prenons l'exemple du plus grand succès du genre, Demand Media. Ici, les sujets à traiter sont identifiés de façon presque scientifique: l'entreprise a développé un algorithme qui tient compte de différents facteurs (en particulier les requêtes faites aux moteurs de recherche et le potentiel publicitaire de certains mots-clés) afin de déterminer les sujets susceptibles de rapporter le plus de revenus. Ces sujets sont ensuite attribués à des journalistes indépendants qui ont pour mission de produire du contenu sur mesure (écrit ou vidéo) le plus vite possible. Par la suite, après peu ou pas de travail éditorial, Demand Media diffuse ce contenu sur YouTube, par exemple, et sur des sites qui lui appartiennent (eHow.com, Cracked.com, etc.), puis engrange les revenus publicitaires liés à l'inévitable avalanche de clics qui en résultent.
C'est plus de 4 000 «contenus» du genre que Demand Media produirait ainsi chaque jour, avec une rentabilité phénoménale: plus de 200 millions de dollars de revenus en 2008, selon BusinessWeek.
On pourrait se réjouir d'un tel succès, à une époque où le journalisme semble être une activité déficitaire. Mais le problème, on l'aura compris, est que l'information produite par les usines à contenu est d'une qualité souvent médiocre. Les sujets, d'abord, sont essentiellement de nature pratique: comment dresser son chien, la meilleure façon de changer un évier, etc. Il n'y a évidemment pas de place pour les enquêtes et les articles de fond, dans un modèle comme celui-ci. De plus, les conditions désolantes offertes aux collaborateurs (autant en terme de rémunération que de délais de livraison) ne sont pas propices à la production d'une information de qualité.
Ce n'est pas pour rien, donc, que ce modèle d'affaires commence à inquiéter beaucoup de monde. Les autres producteurs d'information sont inquiets, bien sûr, puisqu'il leur est impossible de concurrencer les usines à contenus au chapitre de la rentabilité. Mais l'inquiétude touche aussi les journalistes indépendants, qui se demandent comment ils pourront vivre de manière convenable si ce modèle se généralise; les rédacteurs en chef et responsables de section, qui craignent que les considérations commerciales ne deviennent le principal guide de leurs patrons dans le choix des sujets à traiter; et les observateurs des médias en général, qui voient ces articles et vidéos envahir Internet et s'afficher très haut dans les requêtes faites aux moteurs de recherche, entretenant ainsi le cercle vicieux qui favorise leur production...
Car le plus inquiétant n'est peut-être pas les usines à contenus comme telles, mais l'adoption de leurs méthodes par un nombre grandissant d'organisations. Aol, déjà, semble baser une bonne partie de sa future croissance sur des procédés semblables Même chose du côté de MSN et Yahoo, qui a d'ailleurs cherché à acheter Demand Media en 2008. À quand l'emploi de pratiques similaires par un magazine ou un quotidien établi? Cela pourrait se faire plus rapidement—et plus près de chez nous—que l'on pense. On m'a par exemple raconté que le responsable du Web pour un conglomérat médiatique québécois était convaincu que ce genre de processus était l'avenir…
Les usines à contenu préfigurent-elles vraiment ce qui nous attend ou, au contraire, l'information de qualité finira-t-il par s'imposer, malgré les entourloupettes algorithmiques? Quoi qu'il en soit, pour le moment, ce phénomène semble confirmer l'importance de ce nouveau rôle fondamental des journalistes: guider les citoyens vers l'information digne d'intérêt, à travers l'océan de contenu à valeur douteuse sur lequel nous sommes contraints de flotter…
Si on établissait le palmarès des conversations déprimantes qu'il est possible d'avoir, en ce début des années 10, une jasette avec un journaliste s'y trouverait certainement en bonne position, quelque part entre le spécialiste de l'Arctique et l'adéquiste. Bien sûr, les sources de découragement ne manquent pas, pour quiconque tient à une information de qualité. Mais le plus décourageant, dans ces conversations avec les journalistes, ne fait pas partie de cette litanie de problèmes que nous connaissons par coeur (déclin des quotidiens payants, place grandissante de l'infotainment, etc). Le plus décourageant, ce sont plutôt les collègues eux-mêmes. Leur apathie et leur résignation face à l'avenir. Leur attitude «Après nous le déluge». Comme si les journalistes québécois en étaient venus à voir comme indissociables l'avenir de l'information et celui des entreprises qui en ont été le fer de lance au XXe siècle. Comme si, en fait, les journalistes avaient décidé que, dans la grande réorganisation du monde de l'information qui se brasse en ce moment, ils ne seraient que de simples exécutants plutôt que des porteurs de nouveaux projets. Difficile de comprendre ce manque d'initiative et de leadership. La fibre entreprenariale est-elle incompatible avec la flamme journalistique? Bien sûr que non—les exemples contraires sont légions. Il y a évidemment l'immensité des bouleversements actuels et le flou quant aux solutions possibles. Mais cela n'explique pas totalement pourquoi les journalistes québécois sont aussi peu actifs—pourquoi, pour des gens qui disent avoir autant à coeur l'information de qualité, il semblent aussi peu intéressé à se retrousser les manches. Au-delà de toutes les incertitudes qui planent sur nos têtes, au-delà des crises conjoncturelles et des révolutions structurelles, une chose me semble certaine: il est temps pour les journalistes québécois de se lancer activement dans de nouvelles initiatives. De cesser d'attendre un sauveur qui viendrait des conglomérats médiatiques, des gouvernements ou d'un modèle développé ailleurs. Il est temps pour nous, autrement dit, de s'organiser avant de se faire organiser. Que faire, exactement? Le problème de la période actuelle est qu'aucune solution ne s'est encore dégagée, quant à nos questionnements. Mais c'est aussi ce qui fait la beauté et l'effervescence de notre époque: tout est à faire, à inventer. Et tout permet de croire que plein de modèles seront possibles et cohabiteront dans le nouvel écosystème informationnel des décennies à venir. De toute façon, bien avant de rédiger un éventuel plan d'affaires, il y a trois choses que les journalistes peuvent décider de faire, dès aujourd'hui: 1) Prendre conscience du fait que l'avenir de l'information est entre nos mains. Et non pas entre celles des entreprises de presse, ni celles des gouvernements (Dieu nous en préserve). 2) S'informer (et rester informé). À intervalles réguliers, je suis estomaqué par l'absence de curiosité de trop nombreux journalistes face aux changements profonds qui secouent notre métier. La majorité, pour ne donner qu'un exemple, n'ont jamais été voir ce que c'était, Twitter, au juste. C'est la stratégie de l'autruche, et ça n'augure rien de bon. 3) Se regrouper. C'est une évidence, mais il y a certainement des bénéfices à tirer dans le fait de se mettre à deux, à quatre, à 16. Combinons nos idées et nos forces respectives, et voyons ce qui en ressort. De nouvelles initiatives prometteuses naîtront-elles? Peut-être, peut-être pas. Mais l'essentiel est que nous ne serons pas restés les bras croisés pendant que le journalisme était en train de se restructurer. Et si nous pouvons tirer un peu de plaisir de ces discussions et expériences, ce sera déjà ça de gagné sur les déprimantes conversations de la première décennie du XXIe siècle…
Le mois dernier, j'ai annoncé aux membres de l'AJIQ que je solliciterais aussi un siège au conseil d'administration de la FPJQ, lors des élections qui auront lieu au congrès de la fin de semaine prochaine, à Sherbrooke.
Mais je n'avais pas encore donné publiquement les principales raisons qui me poussent à me présenter comme candidat, alors les voici donc:
Je pense que mon expérience, de même que ma connaissance très actuelle des changements technologiques, feront de moi un excellent administrateur pour la FPJQ, et j'invite les collègues qui seront présents en fin de semaine à voter pour moi.
Je tiens d'ailleurs à souligner que les deux candidats à la présidence de la FPJQ, Martin Bisaillon et François Cardinal, soutiennent ma candidature au c.a. J'ai eu plusieurs échanges avec eux depuis un mois, ils sont conscients de l'urgence de faire quelque chose pour les journalistes indépendants, et ils sont tous les deux désireux de travailler avec moi—comme quoi il y a des choses sur lesquelles ils s'entendent, malgré tout!
5e chronique de ma série Siècle no 21, parue dans le magazine Le Trente, novembre 2009.
Sur le blogue du Harvard Business Review, un spécialiste en gestion de carrière écrivait récemment que «dans cette économie du savoir, il va de soi que, tôt ou tard et qu’on le veuille ou non, la plupart d'entre nous aurons éventuellement une carte d'affaires personnelle». Il voulait dire par là que ces forces sociales, économiques et technologiques nous inciteront à devenir notre propre «marque». À se transformer en entrepreneurs, autrement dit.
Bien sûr, en journalisme, il y a déjà un bon moment que ce phénomène s'est amorcé. D'abord avec l'importance grandissante des journalistes indépendants, depuis une vingtaine années; puis, plus récemment, avec la mise de l'avant croissante, par les grands médias, de leurs journalistes. De plus en plus, le public porte attention aux signatures et fait ses choix médias en conséquence.
Mais la montée du journaliste-entrepreneur va au-delà des gros noms et des commentateurs professionnels promus par le média auquel ils sont rattachés. Cette tendance englobe des journalistes de tous les domaines et de tous les niveaux d'expérience et de statut. Et, surtout, on parle ici de journalistes agissant comme de véritables agents libres pouvant offrir leurs services à gauche et à droite au gré des circonstances, mais aussi diffuser directement leur production au public, sans intermédiaire.
Ce phénomène ne va que s'accentuer, au cours des années à venir. D'une part parce que les grandes institutions médiatiques sont en déclin, et que ce déclin sera irréversible. Et d'autre part à cause des immenses avancées technologiques des dernières années, qui permettent aujourd'hui à tout le monde de se lancer dans la diffusion d'information.
Le principal obstacle cet entrepreneuriat grandissant, cependant, demeure le même que celui de l'ensemble du monde de l'information, par les temps révolutionnaires qui courrent: l'argent. Un journaliste a beau avoir le talent, les connaissances et les outils de diffusion, comment peut-il gagner sa vie hors du giron des grandes institutions médiatiques? Réponse facile: «La pub». Mais il est illusoire de penser que le marché publicitaire puisse subvenir aux besoins de tout le monde; même les grands médias, avec leurs importantes équipes de représentants, leur prestige et leur trafic, n'y arrivent pas. Alors un journaliste solo, sans infrastructure de vente ni talent de programmeur...
Mais voilà que de plus en plus de solutions s'offrent aux journalistes qui veulent voler de leurs propres ailes (ou du moins se libérer un peu de leur dépendance envers les médias établis). Un gros portail québécois, par exemple, a commencé à proposer à certains journalistes de prendre en charge les ventes publicitaires sur leur site personnel. Le portail garderait un pourcentage de ces revenus, alors que le journaliste, lui, bénéficierait des forts volumes de trafic provenant du portail. Gagnant-gagnant? Possiblement. Encore là, cependant, on est dans le modèle de l'affichage publicitaire traditionnel; mais cela pourrait tout de même offrir une base financière intéressante pour certains.
Dans un autre genre mais toujours dans cette idée du journaliste-entrepreneur, le projet True/Slant (trueslant.com) contient aussi des éléments prometteurs. Lancé au printemps dernier par Lewis Dvorkin, vétéran du New York Times, Newsweek et TMZ, entre autres, ce site compte actuellement près de 200 collaborateurs indépendants (journalistes, mais aussi experts en tous genres, auteurs, universitaires, etc.) gérés par une équipe d'à peine 10 personnes.
Deux particularités distinguent True/Slant du modèle médiatique traditionnel: d'une part, les collaborateurs sont libres d'écrire ce qu'ils veulent sur ce qu'ils veulent—il n'y aucune assignation, et pas de travail d'édition. Et d'autre part, ils choisissent le mode de rémunération qui leur convient le mieux: tarif fixe, pourcentage des revenus publicitaires, actions dans l'entreprise, même, pour certains. Chaque collaborateur est donc perçu comme une «marque» et peut agir à sa guise, sans aucun engagement ni contrat d'exclusivité. (Le site a aussi un rapport pour le moins novateur à la publicité qui a déjà provoqué quelques débats; les collaborateurs, par exemple, ont aussi le loisir d'approcher eux-mêmes des commanditaires pour leurs textes, ce qui soulève évidemment des questions déontologiques.)
Ce n'est qu'un exemple parmi tant d'autres. Dans l'univers médiatique qui se dessine, les nouveaux modèles sont aussi nombreux que diversifiés. Mais une chose semble déjà acquise: de plus en plus de journalistes auront leur propre carte d'affaires, et celle-ci n'affichera pas le logo d'une entreprise de presse…
Journaliste, commentateur culturel, conseiller littéraire, créateur de projets, éditeur, administrateur, ailier gauche, Montréalais.
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Il y a souvent quelque chose de presque mystique, dans le fait d'être tombé sur un livre précis à un moment précis de notre vie.
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