J'observe la frénésie autour de moi, je lis le statut de mes amis Facebook, et j'ai peur. J'ai peur parce que je sais que beaucoup de gens vont être déçus, au cours des quatre prochaines années.
Oui, Barack Obama est un politicien doué. Mais le mot-clé, ici, c'est politicien. Et aucun politicien, fusse-t-il le président des États-Unis, ne peut changer le monde à lui seul. Pourtant, c'est un peu l'espoir que bien de gens semblent mettre en lui, en ce moment.
Ce dont j'ai peur, c'est que leur déception face à l'influence réelle d'Obama pousse les gens à devenir encore plus cyniques et désabusés, par rapport à la possibilité de changer les choses. Qu'ils baissent les bras pour de bon, en se disant que si même Barack Obama n'est pas capable de faire mieux, il n'y a vraiment rien à faire, aucun espoir.
La semaine dernière, j'interviewais le Dr Gilles Julien pour le magazine Châtelaine. Il m'expliquait comment, à son avis, tout l'argent et les programmes gouvernementaux du monde ne pourront éradiquer la pauvreté chez les enfants. Ce qu'il faut, ce qu'il faudra, c'est qu'un jour toute la communauté retrousse ses manches et se serre les coudes, et prenne en charge le bien-être de ses enfants. Sans cela, aucun changement réel et profond n'est possible.
Et je pense que cette réflexion s'applique à l'ensemble de la société. D'expérience, je sais combien il est difficile de mobiliser les gens, de les pousser à s'impliquer, à faire quelque chose pour les autres. Tout le monde a d'excellentes raisons, bien sûr, à commencer par le manque de temps. C'est bien plus facile de «donner» son statut Facebook à Obama... Malheureusement, tant que nous laisserons à d'autres le travail de changer les choses, nous les condamnons à l'échec. Et nous nous condamnons au statu quo.
Ce que j'espère, c'est que la victoire d'Obama nous donnera envie de faire notre part, dans notre milieu. Que ce soit au niveau social, culturel, économique ou politique, il y a des choses à faire, un urgent besoin de bras et de têtes. Prenons les choses en mains, nous-mêmes: c'est la seule façon de s'assurer que le véritable changement s'opère, et vite.
C'est tellement la chose la plus intelligente que j'ai lu depuis longtemps... merci Nicolas.
Rédigé par : nadia cp | 04 novembre 2008 à 14:23
Merci, tu viens d'identifier le malaise que je ressentais et qui me laissais perplexe, je ne comprenais pas pourquoi je n'avais pas l'impression, comme ceux qui m'entourent, qu'Obama était le Messie et que mercredi matin les gens chanterait en se tenant par les mains dans la rue. Ce n'est pas que je soit désillusionée, mais simplement terre-à-terre sur ce coup là je crois...
Rédigé par : La belle Lurette | 04 novembre 2008 à 15:53
"Prenons les choses en mains, nous-mêmes: c'est la seule façon de s'assurer que le véritable changement s'opère, et vite." C'était le message d'Obama, jusqu'à ce qu'il quitte le monde communautaire pour se lancer en politique... afin d'apporter de réels changements.
http://www.pbs.org/wgbh/pages/frontline/choice2008/view/1.html
Rédigé par : Philippe-A. | 04 novembre 2008 à 17:17
Philippe, je n'ai pas dit que la politique ne sert à rien -- au contraire, c'est essentiel. J'ai dit que le problème, c'est de toujours attendre que quelqu'un d'autre arrange les choses à notre place, que ce soit un politicien, un organisateur communautaire ou animateur télé. Obama, justement, n'a jamais attendu: il s'est impliqué dans le communautaire, après ça à Harvard il s'est impliqué dans la faculté de droit et son journal, puis il est revenu au communautaire, puis à la politique...
Rédigé par : Nicolas Langelier | 04 novembre 2008 à 19:15
Très bon "post" Nicolas, et combien vrai...
Moi ce qui me rend un peu perplexe dans l'effervescence actuelle Obama est le "Change"... Je ne suis pas convaincu que la centaine de millions d'Américains qui ont voté pour lui veulent nécessairement les "mêmes " changements...
D'un autre côté, il me semble que nos voisins étaient murs pour un virage à gauche, mais comme tu le souligne, ça va nécessiter une implication générale. Toutefois, si tu regardes sa campagne, son financement, l'effort mis pour faire "sortir le vote"... c'est du jamais vu au niveau politique "communautaire"...
P.S.: Désolé pour l'abondance de guillements... :)
Rédigé par : Sylvaina | 05 novembre 2008 à 08:54
"Be the change you want to see in the world."
Ok, ça c'était Gandhi, pas Obama... :)
Rédigé par : Sophie | 05 novembre 2008 à 17:14
Je trouve ça un peu facile de vouloir "péter la bulle" des gens qui croient en Obama, deux jours seulement après son élection. Évidemment, qu'il nous décevra comme n'importe quel politicien à un moment donné! Mais ça viendra dans le temps comme dans le temps.
Peut-on seulement se réjouir plus que 2 minutes d'avoir enfin un politicien inspirant et inspiré? Certains s'ennuient de René Lévesque en voyant les Américains vibrer. Je pense que leur "manque" est très révélateur. En cette ère où il est bon d'être athée, nous voulons malgré nous croire en quelque chose de plus grand. Et si c'est de croire quelques jours que tout ou presque est possible grâce à un métisse élu à un des postes les plus prestigieux et lourds à porter de cette terre, qu'on nous laisse cet espoir.
Rédigé par : Sara-Emmanuelle | 07 novembre 2008 à 01:27
Plus grandes sont les réalisations, plus grandes sont les attentes.
Peu importe ce qu'Obama fera, il est certain que les gens s'attendront à plus que ce qui sera donné.
Le raisonnement que vous avez présenté est donc, dans cette optique, un cul-de-sac. Il est certain que les gens seront déçus.
Pour ma part, Obama amène une bouffé d'air frais dans un monde où politique rime avec cynisme. Juste ça, c'est une grande réalisation.
Laissons-nous le droit de rêver un ti-peu.
Rédigé par : Miguel Tremblay | 07 novembre 2008 à 06:51
Je vous accorde la Palme d'Or des textes de blogues pour la décennie 2000-2010 ! Bravo !
Avoir raison à ce point me fait peur...
Mais dites-moi : pourquoi le monde ne veut pas s'impliquer plus que ça ?
Ça me semble évident que notre apathie est la principale cause de tous nos problèmes, non ?
Rédigé par : Bertrand L. | 08 novembre 2008 à 08:15
Je ne pense pas qu'il faut avoir peur. Obama n'est pas un Messie et il a d'ailleurs désamorcé ce piège de la perception en disant dans son discours inaugural que ce ne sera pas facile et qu'il commettra probablement des erreurs à ses débuts. Que de modestie pour un politicien qui vient de canaliser une majorité d'électeurs, et ce même dans des États traditionnellement acquis aux républicains!
Ce qu'Obama a réussi à faire, ce n'est pas seulement de promettre le changement, mais il a inspiré des millions de personnes à reprendre espoir et à avoir une vision du monde tel qu'ils voudraient qu'il soit afin de prendre cette direction.
Je suis bien d'accord avec toi qu'il faut s'impliquer localement pour faire bouger les choses, et depuis que j'ai compris cela je le fais (pour la cause environnementale en ce qui me concerne).
Rédigé par : atomicjonas | 09 novembre 2008 à 17:22
Pour aller dans la continuité d'atomicjonas ici, Obama a même énuméré dans son discours les multiples défis à relevés (guerres, crise financière, alliances à reconstruire, etc) tout en citant aussi que les buts ne s'atteindront pas en un an ni peut-être même en un mandat... Je pense qu'aussi idéalisé cet homme peut être en ce moment, il a probablement le meilleur siège pour donner l'exemple de lucidité, de volonté et d'espoir. Rien ne pourra être parfait dans le monde de la politique américaine et mondiale, mais tout ceci est quand même vraiment mieux que Bush. Je crois que c'est du soulagement un peu qui se fait ressentir, un espèce de vent de terreur qui s'assoupit.
Les USA sont un cancer, Obama le traitement de chimio.
"Comment agit la chimiothérapie?
Les cellules cancéreuses se développent de manière incontrôlée. Les médicaments chimiothérapeutiques peuvent ralentir ou même bloquer le développement des cellules cancéreuses et ainsi les empêcher de se multiplier ou d’envahir d’autres parties du corps.
La chimiothérapie est un traitement puissant qui a des effets sur tout le corps. Par conséquent, elle peut également endommager les cellules saines. Ces dommages aux cellules saines provoquent des effets secondaires. La plupart du temps, ces dommages sont temporaires et les cellules saines se réparent d’elles‑mêmes."
je trouve ça pas si pire. héhé.
Rédigé par : camille | 12 novembre 2008 à 01:35
Belle allégorie, Camille! En espérant que la chimio ne tuera pas le patient... (hihi)
Rédigé par : atomicjonas | 12 novembre 2008 à 17:48
Bonne anticipation, comme on peut le constater maintenant. Mais il n'y a pas que le cynisme comme conséquence, il y a aussi la récupération de la déception par la lie populiste et démagogique d'une certaine frange républicaine et Tea Partyienne.
Rédigé par : Julie Parent | 13 novembre 2010 à 17:44