Adieu cigarettes
«Les bars ne seront plus les mêmes»
et autres clichés
Paru dans le cadre de la chronique Actuelités, La Presse, samedi 3 juin 2006
Journaliste, commentateur culturel, conseiller littéraire, créateur de projets, éditeur, administrateur, ailier gauche, Montréalais.
«Les bars ne seront plus les mêmes» est peut-être un cliché, mais je l'ai répété toute la soirée hier, alors que j'étais en état de choc.
J'ai assisté à la performance de Unireverse, des Perfect Dancers et de l'insaisissable Natacha's Recordings Soundsystem dans le cadre du festival Suoni Per Il Popolo, à la Casa Del Popolo.
Nous entrons, vers 21h, dans la Casa, lieu culte relativement underground que je fréquente depuis des années. Étrange, il faisait drôlement clair dans la salle (pas de fumée). On aurait voulu tamiser les lumières pour que l'endroit retrouve son cachet. Et côté odeurs, tout semblait étrange et tout était déstabilisant. Je pouvais sentir la peinture, la bière séchée, la vieille clope froide.
Enfin, entre chaque performance musicale, un raz-de-marée humain sort prendre une cigarette sur le trottoir, laissant le bar complètement vide, et transportant l'ambiance à l'extérieur. Chaque conversation était découpée ponctuellement en «je vais en griller une, on se reparle tout à l'heure», faisant que je suis même sorti sur le trottoir alors que je ne fume pas. Pas question de passer la soirée tout seul alors que j'ai fait d'excellentes rencontres.
Non, je ne reconnaissais plus ma Casa. Alors j'ai pesté toute la soirée. «Ça fait partie de l'expérience mythique : les yeux pleins de fumée, les poumons encrassés en sortant, les gens qui trinquent sans avoir à se déplacer sans arrêt.» (Ouais, du calme. Je sais, j'étais un peu ivre).
Bon, j'imagine que ça va me passer...
J'imagine.
Rédigé par : Jean-François Proulx | 03 juin 2006 à 13:30